A notre dernière rencontre, j'étais haut comme trois pommes. J'avais 7 ans, elle en avait 13. In Hwa et moi, malgré nos six ans de différence, je me souviens qu'on avait toujours été proches. Jusqu'à ce que mon père disparaisse et que ma mère décide de couper tous les ponts avec sa famille, y compris avec nos cousines.

Quand on a 7 ans, on ne comprend pas trop ce qu'il se passe, on se demande quand est-ce qu'on reverra son oncle et sa tante, quand est-ce qu'on aura l'occasion de jouer à nouveau dans le jardin avec ses cousines. Puis les années passent et on finit par comprendre qu'on venait de les voir pour la dernière fois et qu'on en aura sûrement plus jamais l'occasion.

Puis mon père est revenu, surgissant de nulle part. J'avais arrêté de regarder la porte d'entrée comme un chiot attristé, attendant impatiemment le retour de son maître parti au travail. Il n'avait même pas pris la peine de dire au revoir. Il avait fait comme si c'était normal. Un peu comme le jour où il est réapparu. Et pourtant, malgré toute la colère, la haine que j'avais contre lui, je l'ai laissé se refaire une place dans ma vie. Tout doucement. Sûrement.

Quand d'autres sont partis, lui était toujours là. Alors j'ai fini par accepter sa présence, le fait que quoique je fasse, il serait toujours mon père, mon géniteur et je ne pouvais pas lui retirer. Ca a été dur d'apprendre à être un fils pour lui et pour lui, d'être un père pour Ha Neul et moi. Il nous a fallu tout reconstruire et même si aujourd'hui, la première tuile du toit vient juste d'être posé, je me dis que bientôt, une grande et belle maison nous attendra.

Mais aujourd'hui, ce n'est pas mon père que j'attends. Il y a récemment, j'ai repris contact avec un membre de la famille perdu de vue, une amie auprès de laquelle, je n'avais plus pris de nouvelles. Ma cousine, In Hwa.

Ce n'est pas la première fois qu'on se revoit, mais disons que c'est la première fois qu'il n'y aura qu'elle et moi. Les autres moments, il y avait eu presque toute la famille ou mon père était toujours dans les parages. Puis avec nos emplois du temps, c'était jamais facile de se trouver un créneau en commun alors ce soir, on a sauté sur l'occasion.

J'avais pleins de choses à lui demander, des tonnes de questions à lui poser. Je voulais savoir comment elle avait vécu tout ça. J'étais vraiment curieux, mais je sais qu'il me fallait être patient. La pauvre, j'allais quand même pas lui faire un interrogatoire. Faudrait-il encore que j'arrive à ne dire qu'un seul mot. Je ne suis pas timide, mais comprenez que la situation était quand même particulière. C'était comme faire connaissance avec quelqu'un que vous étiez déjà sensé connaître, quelqu'un de votre propre famille.

Alors oui, je trépigne sur place en l'attendant devant un petit restau, dans un quartier où je ne risquais pas d'attirer la curiosité ou les regardes indiscrets, un endroit où on sera tranquille pour se retrouver. Emmitouflé dans mon écharpe, je la vois au loin qui arrive. Une boule se forme dans mon estomac, mais pourtant, un large sourire s'étire sur mes lèvres parce que, même si je suis anxieux, je suis heureux.

« Hey Noona... »